La situation et l’opération décrites ci-dessous sont courantes.
Monsieur est gérant de la société. Il possède un terrain avec Madame qui est tierce par rapport à la société.
En 1998, les époux propriétaires du sol constituent un droit de superficie au profit de la société qui construit un cabinet médical (50,5 %) et un logement (49,5 %).
La société finance le cabinet et les époux financent le logement.
Le droit de superficie a une durée de 20 ans. L’acte prévoit qu’à l’expiration du droit, l’accession joue sans indemnité.
En 2018, vingt ans plus tard, les époux deviennent donc propriétaires du cabinet médical sans indemnité.
Qu’en pense l’administration fiscale ?
Elle taxe la valeur d’accession gratuite au titre d’ATN chez Monsieur, et au titre d’AAB (avantage anormal ou bénévole) chez la société, chacun pour moitié de la valeur du cabinet.
Pour l’un l’article 32 CIR et pour l’autre l’article 26 CIR.
Dans un jugement du 15 mars 2025 (rôle n° 22/5196/A), le tribunal de première instance d’Anvers, division Anvers, donne raison à l’administration (publié sur Taxwin).
Pour l’administration, des parties indépendantes n’auraient jamais conclu un tel contrat de superficie sans prévoir d’indemnité.
L’évaluation de l’avantage fut donc faite conformément au marché.
Les époux opposaient que les avantages n’étaient plus imposables car ils étaient nés au moment de l’acte de superficie.
Pas du tout dirent en cœur l’administration et le tribunal, l’avantage a été consenti au moment de l’accession.
La Cour de cassation avait déjà jugé dans un arrêt du 16 juin 2023 (F.22.0001.N) que c’est bien le moment de l’accession qui est à déterminer pour situer l’avantage.
Il existe en matière d’accession une circulaire n° 8/2004 (Dos. E.E./97.387) du 13 mai 2004 (erratum du 24 juin 2004).
Mais on verra qu’elle ne couvre pas le problématique complète.
On peut résumer la circulaire comme suit :
- Superficie gratuite et accession gratuite :
En ce cas, le prix réel du droit est l’accession gratuite et les droits sont perçus sur cette valeur à déclarer dans l’acte selon l’article 168 CDE, sauf animus donandi, auquel cas les droits sont dus sur la donation.
- Superficie gratuite et indemnité normale d’accession :
Le droit de superficie est frappé du droit général fixe. On assimile ici l’absence de prix au prix symbolique.
- Redevance de superficie normale et accession sans indemnité ou moyennant un prix inférieur à la valeur réelle :
En ce cas, l’administration considère que l’accession ne représente pas la véritable redevance de superficie ni qu’elle soit une charge fiscale à ajouter à la base de perception.
Toutefois, si l’acte constitutif fait explicitement ou implicitement obligation de construire, l’accession gratuite ou à prix inférieur est considérée comme une charge taxable.
Comme on le voit, la circulaire traite la matière sur le plan des droits d’enregistrement. Elle ne couvre pas l’entièreté de la problématique.
Il ne faut pas oublier qu’une redevance de superficie qui échoit à une personne physique est aussi un revenu immobilier taxable à l’IPP (art. 7 et 10 CIR) aux taux progressifs par tranche.
Enfin la circulaire n’évoque pas le principe d’attraction et l’ATN dirigeant. Pas davantage l’avantage anormal ou bénévole si la gratuité de l’accession profite à une personne étrangère à la société.
Or les décisions comme celle d’Anvers ci-dessus, se multiplient.
On peut se demander, en s’inspirant de la circulaire, si le fait que le droit de superficie soit gratuit ne compense pas la gratuité de l’accession, et réduise l’avantage.
Des parties indépendantes, pour reprendre le critère de l’administration, auraient tenu compte de cet équilibre.
Mais je ne pense pas que ce soit déterminant. Il faut rester prudent.
Si un dirigeant fait un avantage à sa société, cela n’a pas pour conséquence que l’avantage que lui fait celle-ci ne soit plus taxable …
Bref, aujourd’hui, la circulaire n’est plus une référence pour construire les montages en superficie dès lors qu’il faut constater qu’elle n’aborde pas les importantes conséquences en matière d’impôts directs.
Il faut réfléchir le problème en considération des ATN et AAB (comme les montages en usufruit) ce qui réduit considérablement l’intérêt des opérations sur superficie.
La photo : le coin formé par l’avenue de la Folle Chanson et l’avenue Emile Duray est riche architecturalement. À gauche un superbe immeuble à appartements qui fait la transition entre l’Art-Déco et le modernisme, conçu par Adrien Blomme (1927). À droite, le Palais de La Cambre de style Art-Déco (Camille Damman, 1925-1930). Ce bel ensemble n’est pas en pierre de France, comme on pourrait le croire. La façade est faite d’un revêtement en aggloméré. Malheureusement, les bâtiments s’enfoncent dans le sol ce qui pose bien des problèmes de stabilité. De plus il est composé de plusieurs ACP ce qui rend difficiles la coordination des travaux. L’avenue de la Folle Chanson doit son nom à une célèbre statue du sculpteur Jef Lambeaux (1852-1908) qui s’y trouvait et qui fut déplacée au square Ambiorix. Selon monument.heritage.brussels, cette œuvre, qui fit scandale lors de son exposition en 1884, représente une nymphe nue jouant des castagnettes et fredonnant un air probablement grivois à l’oreille d’un faune qui s’esclaffe. Il est dommage que les habitants de la Folle Chanson soient aujourd’hui privés de cette artistique source d’inspiration. Le tracé de ces rues trouve son origine dans l’exposition internationale de 1910 entre l’avenue des Nations et le Solboch.
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