La Cour d’appel de Mons était saisie d’un litige assez courant : une infraction d’urbanisme est découverte après la vente.
La Cour va rendre un arrêt qui retient notre attention (Mons, 17 novembre 2010, J.L.M.B., 2012, p. 520)
Le vice était bénin et régularisable, et le vendeur s’empressa de poursuivre cette régularisation. Mais elle n’a pu intervenir avant la date prévue pour la délivrance.
Le vendeur n’a pas fait preuve de malice ; il ignorait le vice et fit immédiatement le nécessaire pour régulariser la situation.
Le juge écarte donc le dol tout comme l’erreur sur la substance de la chose.
Mais l’immeuble un appartement à Nivelles n’a pu être délivré exempt de vise à la date prévue pour la délivrance, c’est-à-dire à l’acte.
L’acheteur renonça à la vente malgré les efforts du vendeur, préférant faire profit de l’indemnité contractuelle de 10 % du prix.
L’acheteur poursuivit donc l’annulation de la vente, et subsidiairement sa résolution, ainsi que le paiement de l’indemnité contractuelle.
Le vendeur quant à lui, proposait de suspendre la délivrance, le temps de régulariser la situation d’urbanisme, tout en donnant la jouissance des lieux à l’acheteur.
La Cour d’appel va rendre un arrêt d’une grande sagesse. Jugez-en :
« Dans les circonstances de l’espèce telles qu’elles résultent des pièces déposées par les parties, ni le dol ni l’erreur sur la substance n’étant établies comme précisé à juste titre par le premier juge, il n’y a pas lieu à annulation de la vente mais à sa résolution aux torts réciproques soit pour manquements graves respectifs des deux parties à leurs obligations.
En effet, l’infraction urbanistique affectant le bien vendu est établie, le permis de régularisation n’ayant été obtenu qu’après la date fixée pour la signature de l’acte authentique : la venderesse a donc manqué à son obligation de délivrance d’une chose exempte de vice.
Les intimés (acheteurs) ont pour leur part manqué à l’obligation d’exécution de bonne foi de la convention en refusant les propositions de l’appelante de postposer la date de signature de l’acte authentique, avec possibilité de location du bien dans l’intervalle dans l’attente de la régularisation urbanistique, ou d’annuler purement et simplement la vente.
Les parties doivent, en conséquence, être remises dans la situation où elles se seraient trouvées si elles n’avaient pas contracté, le contrat résolu ne pouvant plus servir de fondement à leurs droits et obligations (Cass., 6 juin 1996, Pas., 594).
Elles doivent en outre réparer le dommage causé à l’autre en fonction de la gravité de leurs manquements respectifs.
Leurs fautes sont, en l’espèce, d’égale gravité : l’infraction urbanistique affectant le bien vendu à la date fixée pour la passation de l’acte authentique est en effet aussi grave que le refus des intimés d’envisager une solution amiable.
L’appelante doit aux intimés les frais de dossier de prêt hypothécaire inutilement exposés par eux et une indemnité à fixer ex aequo et bono, à défaut de toute autre possibilité, pour les tracasseries à eux causées par le défaut de passation de l’acte authentique, en ce compris l’obligation de se reloger.
De son côté, Madame V. a droit à l’indemnisation du préjudice subi à la suite de ce défaut : elle justifie à ce propos de l’obtention d’une offre de crédit logement le 15 avril 2005 et de la fixation d’une date pour la signature des actes de prêt et d’achat d’un immeuble sis à Nalinnes le 13 mai suivant, mais elle ne fournit aucun élément précis permettant de chiffrer les conséquences de la remise en vente de l’appartement litigieux notamment vis-à-vis de son banquier : elle a droit à une indemnité fixée ex aequo et bono.
Les dommages subis de part et d’autre sont considérés, en fonction des éléments soumis à la cour, comme étant équivalents. »
L’agent immobilier était cité en intervention et garantie.
On lui reprochait d’avoir manqué à son devoir de conseil envers le vendeur et d’information envers l’acheteur.
A son égard également, la Cour fait preuve d’un grand réalisme :
« Enfin, comme dit à juste titre par le premier juge, aucune faute n’est établie dans le chef de la SCRL I., le devoir de conseil et d’information d’une agence immobilière devant s’entendre de manière raisonnable et ne pouvant s’étendre à la vérification d’office d’une éventuelle infraction urbanistique du bien offert en vente. »
Cet arrêt a le mérite de rappeler aux parties qu’elles doivent loyalement collaborer en vue de faire prospérer leur contrat. Pour le reste, je renvoie les lecteurs à mon article du 15 janvier 2013.
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