Une société reçoit une option d’achat sur un immeuble qui prévoit une indemnité d’immobilisation de 10 % du prix, déposée chez le notaire, qui sera convertie en acompte en cas de levée de l’option d’achat.
La société bénéficiaire ne lève pas l’option dans son délai de validité.
Elle est citée t par la société promettante, en libération en sa faveur de l’indemnité d’immobilisation.
La Cour d’appel de Montpellier déboute la société promettante au motif de ce qu’il ne s’agit pas d’une indemnité ni d’une promesse de vente.
Selon la Cour, l’importance de l’indemnité crée une véritable obligation d’acquérir à la charge du bénéficiaire, transformant la promesse unilatérale de vente en contrat synallagmatique.
Mais sur le visa de l’article 1589 du Code civil, la Cour de cassation française casse l’arrêt de la Cour d’appel de Montpellier.
En effet, en statuant ainsi, sans relever que la promesse de vente était assortie d’une indemnité si importante par rapport au prix de vente qu’elle privait la société bénéficiaire de sa liberté d’acheter ou de ne pas acheter, la Cour d’appel n’avait pas donné de base légale à sa décision (Cass., fr., 3ième chambre, 26 septembre 2012).
Cette jurisprudence est-elle transposable en droit belge ?
Le premier alinéa de l’article 1589 Code civil, appliqué en l’espèce, est commun aux deux droits.
De plus, le juge n’est pas lié par la qualification donnée au contrat par les parties.
Il peut requalifier une convention lorsque ses termes sont incompatibles avec sa qualification.
Le juge peut également constater que l’exécution donnée à une convention indique que les parties ont adopté une autre convention que celle initialement conclue.
Mais le juge doit constater de manière certaine que l’option payante constitue en réalité une vente.
L’énormité du prix de l’option (ou de l’indemnité d’immobilisation), imputable sur le prix de l’immeuble) peut certes priver le bénéficiaire de tout intérêt à ne pas acheter, mais cela ne le prive pas nécessairement de sa liberté d’acheter ou de ne pas acheter.
Cela révèle que le bénéficiaire avait bien l’intention de lever l’option, mais pas forcément qu’il entendait déjà conclure une vente, préférant bénéficier du délai d’option sans encourir immédiatement les charges de la vente.
Aussi, à mon avis, l’énormité du prix de l’option n’est pas en elle-même déterminante.
Que se passe-t-il si la promesse unilatérale est requalifiée en vente ?
L’indemnité évoquée ne peut plus être regardée comme le prix du droit exclusif d’acheter, le bénéficiaire étant en effet considéré comme dépourvu d’une option.
L’indemnité ou le prix de l’option peut constituer en ce cas le prix de la possibilité offerte au bénéficiaire de renoncer à acheter, c’est-à-dire un dédit.
En ce cas, qu’il y ait promesse ou directement vente, le bénéficiaire doit payer l’indemnité s’il ne veut acheter.
L’indemnité de dédit permet de renoncer à la vente ; comment cette dernière est-elle alors fiscalement traitée ?
La vente avec faculté de dédit est considérée par l’administration comme présentant un caractère alternatif, en ce que chacune des parties ou l’une d’entre elles aura le droit de se départir du contrat moyennant le versement d’une somme déterminée.
Cette vente est traitée comme une vente avec des arrhes. Elle ne donne pas lieu à la perception du droit proportionnel, aussi longtemps que les parties n’ont pas opté définitivement pour la vente et l’achat.
Les arrhes sont payées avant que les parties n’aient choisi de se départir du contrat, tandis que le dédit est payé après la décision de se retirer de la vente.
C’est la seule différence, mais fiscalement pour la perception des droits d’enregistrement, il n’y a pas de différence : le droit proportionnel ne sera perçu qu’au moment où le sort de la vente sera acquis (F. WERDEFROY, Droits d’enregistrement, II, n° 652).
Un jugement du tribunal de première instance de Bruxelles du 24 février 1982 (R.G.E.N., 1982, n° 23.033 – dr n° E.E./84.865) considère que qu’une option d’achat doit être considérée comme un compromis de vente pur et simple dans le cas suivant.
L’option fut donnée au prix de 1.500.000 anciens francs sur lequel est versée une garantie de 500.000 F dont quittance, à déduire du prix lors de la vente « éventuelle ».
L’acquéreuse n’avait pas levé l’option avant la passation de l’acte notarié d’acquisition, ce qui laisse supposer qu’elle considérait la vente parfaite entre parties dès la signature de la convention. Elle se considérait comme propriétaire puisqu’elle déclara que le vendeur occupait le bien gratuitement avant la passation de l’acte authentique.