L’inscription à l’inventaire ne doit pas être confondue avec une mesure de protection du patrimoine comme l’inscription à la liste de sauvegarde ou le classement.
L’article 207, § 1, alinéa 2, du CoBAT charge le Gouvernement « de dresser, tenir à jour et publier l’inventaire du patrimoine immobilier. »
En attendant que le Gouvernement achève ce vaste programme, il existait une mesure transitoire portant à l’inventaire les immeubles ayant fait l’objet d’un permis avant le 1er janvier 1932 (art. 333 du CoBAT).
Les choses se sont accélérées en 2024.
L’arrêté du Gouvernement du 8 février 2024 a défini la procédure de mise en œuvre et les mentions de l’inventaire.
Les coordonnées sont données en Lambert x et y (les géomètres comprendront).
L’inventaire a été constitué par des arrêtés du 4 avril 2024.
Il y a désormais 3.197 arbres remarquables et 41.144 immeubles qui sont listés dans l’annexe du Moniteur belge du 19 août 2024.
On y retrouve en réalité les biens repérés dans l’inventaire d’urgence publié en 1975 par l’ASBL Sint-Lukasarchief.
En exécution de l’article 207 précité, l’administration tient à jour un site Internet des Monuments et Sites (www.irismonument.be). Et https://sites.heritage.brussels pour les arbres remarquables.
Le site est sans effet légal puisque le CoBAT prévoit une mention au Moniteur belge (C.E., n° 237.719, 20 mars 2017, Haelvoet).
Or, justement, l’inventaire légal du patrimoine immobilier a été publié au Moniteur belge du 19 août 2024.
L’inscription d’un bien au patrimoine immobilier prend effet dès sa publication par mention au Moniteur belge.
Cette mesure de publicité (M.B.) a fait courir le délai de recours en annulation au Conseil d’Etat.
Autant dire que depuis ce jour, 19 octobre, la liste est devenue définitive à l’insu de bien des propriétaires.
Un recours n’était pourtant pas vain puisque l’inscription est un acte de portée individuelle produisant des effets juridiques, qui est totalement dépourvu de motivation, contrairement à la loi du 29 juillet 1991.
Il faut dire que donner une motivation individualisée et adéquate à 44.341 inscriptions, cela représente un travail propre à décourager l’administration.
Encore faut-il voir les effets juridiques de l’inscription.
Il y a surtout des effets procéduraux.
L’effet principal de l’inscription d’un bien à l’inventaire entraîne l’obligation de soumettre toute demande de permis portant sur ces biens à l’avis de la commission de concertation, qui peut décider de consulter la CRMS (art. 207, § 3) qui pourra rendre un avis simple mais non conforme.
Mais l’arrêté du Gouvernement dit « minime importance », du 13 novembre 2008, peut dispenser certains actes et travaux de cet avis (art. 207, § 3, al. 2, et art. 10/1, 13/1, 34sexies, 35/9/1 et 35/13/1 de l’arrêté).
Pour les arbres inscrits à l’inventaire, un permis d’urbanisme est désormais requis pour modifier leur silhouette (art. 98, § 1, 8°/1). Ce permis est dispensé d’avis d’instances (art. 32/1 de l’AG « Minime importance »)
Les arbres reconnus comme « petit patrimoine » (art. 206, 11°, c) du CoBAT) bénéficient à ce titre de subventions pour les interventions nécessaires à leur conservation (art. 240, § 4, du CoBAT et arrêté du Gouvernement du 24 juin 2010, modifié par l’arrêté du 11 mars 2021).
On peut aussi voir les arbres remarquable sur le site de la carte Brugis (en cliquant l’adresse de recherche).
C’est une bonne chose que la silhouette des arbres remarquables soit protégée. Souvent on affine la couronne et on étête les arbres qui prennent du volume, car en ville les jardins sont petits.
J’ajoute un élément concernant l’étêtage.
Or cette pratique peut mettre à mal la survie de l’arbre dans le cas où la proportion supprimée est trop importante (>20-25 % selon les cas d’espèces, parfois moins suivant l’exposition du houppier.
La raison de cela nous est donnée par l’expert Prof. Baudry : l’apport soudain de rayonnement au cœur du houppier provoque des échauffements, la structure du houppier est déséquilibrée et, sur le plan du développement futur de l’arbre, les rejets qui se forment et/ou les branches résiduelles présenteront des points de faiblesse au niveau de leur ancrage.
La pratique de l’étêtage est à présent déconseillée et ne fait plus partie des « règles de l’art ».
Pour revenir aux immeubles, l’urbaniste Pascal Hanique pointe un autre effet.
Selon lui, les dispenses accordées par l’arrêté du 13 novembre 2008 pourraient prendre de l’importance, dans un avenir proche, pour alléger la procédure de permis visant de travaux intérieurs ou extérieurs dans le cadre de la mise en œuvre des exigences de PEB.
C’est vrai qu’être dispensé de Concertation donc d’avis de la CRMS, ne peut que faciliter les choses pour les immeuble présentant un intérêt patrimonial.
La photo : voici un bel exemple d’immeuble inscrit à l’inventaire, l’immeuble à appartements de style moderniste rue Jean Baptiste Colyns 1 à Ixelles (architecte Jean Florian Collin, 1935). Dans sa belle période, cet architecte ou plutôt ce promoteur (c’était Etrimo) travaillait avec Jasinski qui était, lui, un vrai grand architecte. L’expression symétrique des médianes et de l’oriel central aux angles arrondis rappelle d’autres créations de Etrimo (Le Ernestine, le Tonneau, Le Général de gaule, etc.).
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