Skip to content

Gilles Carnoy logo Carnet de route en Droit Immobilier

Carnoy & Braeckeveldt, avocats de l’immobilier à Bruxelles

Acceptation d’offre et vente par porte-fort

Un arrêt inédit de la Cour d’appel de Bruxelles du 19 janvier 2024 (RG n° 2019/AR/856) rappelle les principes en matière de porte-fort, qui sont souvent méconnus.

Il s’agissait d’une offre d’achat émise par une personne se portant fort pour une société qui ratifiera plus tard.

C’est un porte-fort « nu », le porte-fort n’est pas tenu personnellement à défaut de ratification par le tiers.

La Cour y a vu une clause de porte-fort couvrant un engagement déjà contracté lui permettant de conclure à l’existence d’une vente sous réserve de ratification du seul fait de l’acceptation.

La question était que la ratification intervint après le délai de l’offre émise, alors que l’acceptation de l’offre avait bien été réalisée dans le délai.

Autrement dit, peut-on ratifier un acte après la période de validité de l’acte ?

L’arrêt décide qu’il existe immédiatement une vente parfaite résultante de la rencontre de l’offre émise par le porte-fort  et l’acceptant.

Le contrat conclu entre le tiers et le porte-fort existe dès avant toute ratification.

Il présente toutefois cette particularité remarquable de ne pouvoir sortir aucun effet, pas plus entre ces deux personnes qu’entre les parties à la promesse de porte-fort (P. Wéry, « Droit des obligations », t. 1, Théorie générale du contrat, Bruxelles, Larcier, 2021, p. 931, n° 920).

Il appartient alors au porte-fort de rapporter la ratification, par le tiers, du contrat conclu en son nom et pour son compte, laquelle couvrira l’absence de pouvoir du porte-fort avec effet rétroactif (P. Wery, opus cité, p. 928, n° 916).

Ainsi en va-t-il de la vente avec clause de porte-fort résultant de la rencontre d’une offre avec clause de porte-fort et de son acceptation, laquelle acceptation doit être considérée comme couvrant également la clause de porte-fort.

Dès lors, il y a bien une vente parfaite, dont seule l’exécution était suspendue jusqu’à la ratification.

Cette vente est née durant la période de validité de l’offre, peu importe que la ratification intervienne après.

Bref, la ratification ne doit pas nécessairement intervenir pendant la durée de validité de l’offre d’achat puisque seule l’exécution de la vente était restée en suspens en attendant la ratification.

Certes, la ratification intervient avec un effet rétroactif qui ne peut nuire aux droits déjà acquis par les tiers.

Mais l’acceptant n’est pas un véritable tiers : le tiers qui a traité volontairement avec le représentant subit intégralement l’effet rétroactif de la ratification (R. Jafferali, La rétroactivité dans le contrat. Etude d’une notion fonctionnelle à la lumière du principe constitutionnel d’égalité, Bruxelles, Bruylant, 2014, p. 269, n° 142).

Comme le dit Monsieur Jafferali : « la Cour de cassation considère que le tiers qui a contracté avec le représentant dénué de pouvoir est tenu depuis l’origine par cet acte en cas de ratification de celui-ci. (…)  Il n’existe donc aucun ‘droit acquis’ dont le tiers contractant puisse se prévaloir pour s’opposer à l’effet rétroactif de la ratification à son encontre, et ce, même lorsque l’acte devait être accompli dans un délai de rigueur. »

Enfin, la Cour confirme que la ratification n’est pas un acte réceptice pour ce qui concerne le cocontractant.

Terminons en précisant que le livre 5 du Code civil confirme, à l’article 5.106, le caractère rétroactif de la ratification : lorsque le porte-fort a pour objet la ratification d’un acte juridique conclu au nom et pour compte d’autrui, celle-ci rétroagit à la date du porte-fort, sans préjudice des droits acquis par les tiers.

La photo : maison de style art-déco avenue Guillaume Macau à Ixelles (architecte Julien Vanpaemel, 1924). Cette avenue au bâti éclectique de qualité est bien connue pour être particulièrement large et flanquée, de surcroit, de zones de recul de huit mètres qui ajoutent à sa prestance. Mais elle est courte, hélas ! Les zones de recul procèdent d’une servitude non-aedificandi prévue pour l’aménagement d’un jardinet participant à la conception paysagère et pittoresque du quartier des Étangs, selon une convention de 1873 entre la Commune d’Ixelles et le promoteur Société de l’Avenue Louise (source : Monument héritage). Les architectes fameux Edmond et Léon Delune sont les auteurs de plusieurs beaux immeubles de style Art-Nouveau. Enfin, le  tracé de l’avenue procède d’un plan d’expropriation et d’aménagement des abords des étangs (arrêté royal du 22 août 1873) de l’inspecteur voyer des faubourgs de Bruxelles Victor Besme et du directeur des Travaux publics d’Ixelles Louis Coenraets, deux personnalités célèbres pour avoir façonné le Bruxelles que nous connaissons aujourd’hui.

Commentaires

facebook comments:

Pas encore de commentaire

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

close